Une organisatrice qui a contribué à l’élection d’Obama espère secouer le vote autochtone au Canada

Cara Currie Hall, de la Nation crie d’Enoch, en Alberta, espère amener les électeurs autochtones canadiens à voter. (Photo : Brandi Morin/APTN)

Brandi Morin
Nouvelles nationales de l’APTN
Une des fondatrices du mouvement « Rock the Indigenous Vote » aux États-Unis appelle les peuples autochtones du Canada à exercer leur droit de vote.

Cara Currie Hall a déclaré qu’il est temps que les voix des peuples autochtones se fassent entendre haut et fort.

« Je pense qu’ensemble, nous pouvons faire résonner le tonnerre dans tout le pays », affirme-t-elle. « Nous entendons le battement des tambours. Prêtez l’oreille, écoutez-les, parce que nous nous levons! »

Mme Currie Hall, qui est née et a grandi à Maskwacis, en Alberta, sur le territoire de la Première Nation de Montana, est issue d’une longue lignée de personnes influentes sur le plan politique.

Le père de sa mère était un chef tribal de sa communauté.

Son père, Cecile Currie Senior, fut le chef de la Première Nation de Montana dans les années 1960, tout comme son père l’avait été avant lui.

Mme Currie Hall relate que son père a été l’un des initiateurs de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et qu’il a collaboré étroitement avec Wilton Littlechild, qui a contribué à la rédaction et à l’élaboration de la Déclaration.

« Mon père a été l’un des premiers à travailler à la défense de vos droits issus des traités. Le vote fait aussi partie de la défense de vos droits issus des traités.

« Le gouvernement essaie de nous opprimer et d’éliminer ces droits; nous devons le faire reculer comme dans les années 1960 avec le Livre blanc. »

Depuis 16 ans, Cara Currie Hall vit au Dakota du Nord, dans la réserve indienne de Fort Berthold. Son mari est un chef tribal membre du conseil de bande de la réserve.

En 2007, pendant la première campagne à la présidence de Barack Obama, Mme Currie Hall a aidé à amener les Amérindiens à voter en bloc pour lui. Elle affirme que ce geste a débouché sur la nomination d’une Amérindienne au sein du personnel dirigeant du bureau du président Obama et d’un avocat amérindien au titre d’ambassadeur des États-Unis.

Faith Hall
La fille de Cara Currie Hall, Faith, en veste rose, serre la main du président Barack Obama à l’occasion d’une visite présidentielle à la tribu sioux de Standing Rock en 2014. Photo fournie à titre gracieux par Cara Currie Hall.

« Nous avons aux États-Unis un président qui a reconnu que nous pouvions lui apporter un vote massif, et les Amérindiens l’ont appuyé à 80 %. »

Elle déclare que les électeurs autochtones sont une force avec laquelle il faut compter.

« Quand nous avons gagné, Obama a respecté ses promesses. Nous avons eu un accès et un dialogue directs avec le président », rappelle-t-elle. « Maintenant, il organise un sommet annuel axé sur le dialogue avec des chefs tribaux, et la rencontre se fait de nation à nation. »

Mme Currie Hall explique que « Rock the Indigenous Vote » est un mouvement populaire, par le peuple et pour le peuple, né d’un petit réseau de personnes qui ont fait passer le mot et qui ont atteint leur objectif.

Elle est persuadée qu’il serait possible d’avoir un impact similaire au Canada aux prochaines élections.

Cara and Friends at Obama
Cara Currie Hall avec sa fille Faith et des amies lors de la visite du président Barack Obama à la tribu sioux de Standing Rock en 2014. Photo fournie à titre gracieux par Cara Currie Hall.

La semaine dernière, elle est revenue au Canada pour aider à convaincre les Autochtones d’aller voter.

« Au Canada, nous ne sommes pas pris en compte dans les statistiques. Ensemble, les Premières Nations, les Métis et les Inuits représentent plusieurs millions de personnes; ça, c’est un vote en bloc. Au moins 50 candidats autochtones tentent de se faire élire », explique-t-elle.

« Voici ce que nous pouvons faire. Premièrement, nous faisons passer le mot : il faut aller voter. Deuxièmement, nous allons vraiment voter. Puis, nous renversons les statistiques », dit-elle. « Ainsi, nous devenons le bloc qui n’a jamais été pris en compte dans les sondages et les statistiques. Nous élisons ensuite 50 députés. Nous pourrions amener 50 personnes à la Chambre des communes. C’est tout à fait faisable en 14 jours! »

Mme Currie Hall a déclaré que l’une de ses principales motivations la poussant à « secouer le vote autochtone » est de faire entendre et de représenter la voix des Autochtones à l’échelle du pays.

« C’est là toute notre histoire : nous n’avons jamais été soutenus. Ils (les dirigeants canadiens) ont tenté par tous les moyens de nous assimiler et d’en finir avec nous, comme le font la plupart des gouvernements du monde. C’est ce que fait le gouvernement canadien aujourd’hui. »

Le gouvernement fédéral a adopté la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, mais il maintient que ce document ne représente que des aspirations et qu’il n’est pas juridiquement contraignant au Canada.

« Tout d’abord, il s’agit de mettre en œuvre le consentement préalable, libre et éclairé », a souligné Mme Currie Hall. « Cela signifie qu’aucun plan d’aménagement ne va de l’avant sans avoir reçu le consentement préalable, libre et éclairé des Autochtones, car ce sont eux les propriétaires du minerai et du territoire. Cela signifie que rien ne se fait sans leur plein consentement. »

Elle soutient aussi que les Autochtones doivent invoquer l’inclusion du Dieu Créateur et en appeler à Lui pour s’orienter dans le processus électoral.

« Nous sommes un peuple spirituel, nous prions et nous reconnaissons l’existence d’un Créateur. Dieu est le Souverain suprême. Notre peuple a compris que “souverain”, dans ce contexte, signifie qu’il y a quelqu’un au-dessus de nous et que nous avons besoin de son aide. Les répercussions de nos actions d’aujourd’hui seront ressenties par les générations qui nous suivront. »

Cette semaine, Cara Currie Hall discutera avec des Chefs de partout au Canada à l’occasion d’une réunion à Enoch, en Alberta, dans le cadre du Forum ouvert sur les Premières Nations et l’élection fédérale, organisé mercredi par l’Assemblée des Premières Nations (APN).

Hall with group
De gauche à droite : Cara Currie Hall, le Grand Chef Tony Alexis de la Confédération du Traité 6, Nicole Robertson et Sharon Seright appuient le mouvement « Rock the Indigenous Vote » lors d’une danse ronde sous forme de mobilisation éclair, jeudi dernier à Edmonton. (Photo : Brandi Morin/APTN.)

Le Chef régional de l’APN pour l’Alberta, Craig Mackinaw, a déclaré qu’il appuie le mouvement « Rock the Indigenous Vote » et qu’il prévoit voter le 19 octobre.

« Le gouvernement ne nous a vraiment pas écoutés, et c’est un peu pour cela que je vais aller voter », a déclaré M. Mackinaw.

Il se dit d’accord avec Mme Currie Hall sur le fait que le vote autochtone pourrait avoir une incidence à l’échelle fédérale.

« Quand on regarde ce qui s’est passé en Alberta (à la dernière élection provinciale), quand les gens décident d’aller voter, cela fait vraiment une différence. »

À ceux qui sont indécis quant à l’exercice de leur droit de vote, Mme Currie Hall a déclaré que les traités sont enchâssés dans la constitution canadienne et que le fait de voter ne compromet en rien la souveraineté d’une nation.

« La citoyenneté nous a été donnée à la signature du traité. Nous avons donc la double citoyenneté. Nous sommes un peuple souverain, nous sommes des peuples signataires de traités, mais nous sommes aussi des citoyens canadiens. Il faut voir là une occasion de changer le gouvernement auprès de qui nous sommes engagés », fait-elle valoir.

Cara Currie Hall travaille au sein d’une équipe répartie dans tout le Canada afin de faire circuler le message de « Rock the Indigenous Vote ».

La semaine dernière, à Edmonton, une mobilisation éclair (flashmob) a donné lieu à une danse ronde; les médias sociaux et d’autres initiatives populaires sont en marche, mais le but ultime est d’amener les gens aux bureaux de scrutin.

Cara Currie Hall à la Nation crie d’Enoch, en Alberta. (Photo : Brandi Morin/APTN.)

« Usez de stratégie. Nos ancêtres étaient des guerriers, et nous devons nous aussi en être aujourd’hui. Nous ne voulons pas faire de compromis. C’est pour nous une formidable occasion de changer la façon dont le monde fonctionne pour nous », soutient Mme Currie Hall. « Nous ne nous soulevons pas dans la confrontation; nous reprenons ce qui nous appartient déjà. Nous reprenons notre place dans la société, notre propriété du territoire et le mode de fonctionnement de ce gouvernement. »

 

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